Je ne t’en parlerai plus

Se lever à 5 h 30 pour être à l’heure la Clinique qui fait des bébés.

Dans la salle d’attente, nous regarder toutes « par en dessous », chuchoter un bonjour, se plonger dans notre dossier, dans un magazine que nous ne lisons pas. C’est juste pour faire genre. A cette heure nous sommes toutes là pour la même chose, encore un peu endormies et anxieuses quant aux résultats.

Subir un défilé d’infirmières à heure fixe, écouter leurs théories sur le sujet : « A la première FIV ça ne marche jamais, il en faut au moins 3, je connais des « fiveurs » qui… » Sourire à toutes ces théories sans donner prise, encaisser la quantité non négligeable de piqûres. Regarder les bleus sur les bras, se masser le ventre hyper tendu, lui parler, le remettre au centre.

Attendre, être un peu coincés à la maison.

Jongler avec les nombreux effets secondaires, ne pas dormir, tenter de tenir au boulot, pleurer pour un oui ou pour un non.

Devoir poser des congés à la dernière minute et mentir sur les raisons.

Ne trouver aucun réconfort. Nulle part, auprès de personne.

Garder pour soi les doutes et les peurs, pour ne pas effrayer.

Détester les sigles, les taux, le vocabulaire médical.

Tenter de vivre l’expérience de  » l’extérieur », faire comme si.

Déplorer le manque de lien avec la gynécologue, le manque d’humanité mais croire malgré tout en sa compétence « technique ».

Remettre de la joie, se projeter positivement dans l’avenir sous peine de se laisser submerger par ce protocole hyper-médicalisé.

Prendre soin du corps tant bien que mal, dans son ensemble, car encore une fois, il est durement mis à l’épreuve.

Explorer finement son projet de vie, de famille, de femme. Savoir désormais très exactement pourquoi on en est là ensemble.

Que ça marche ou pas, je ne t’en parlerai plus.

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22 réflexions sur “Je ne t’en parlerai plus

  1. Moune dit :

    Mais si bien sûr parles-en ! Rien ne peut te faire plus de bien, t’aider à passer ces moments difficiles ! Parler, c’est déjà guérir un peu ! Ici tu es chez toi, tu te fais du bien, tu partages et c’est nécessaire ! Intérioriser tout ça ? Non ! Surtout pas ! Nous sommes là pour écouter tes angoisses, tes douleurs, et nous serons là ensuite pour partager ta joie. Car la joie est au bout de ce chemin difficile… N’est-ce-pas ? Bon courage et des bises, des bises, des bises !

  2. Anne-So dit :

    Chapeau pour le projet de vie, vraiment.
    Et rude, tout cela… Cela a l’air si froid…
    Tu sais, tout de même, ça peut être pas mal d’en reparler ici…

  3. Julie-A dit :

    Pas question ! Je suis contre ! Ici, on écoute (ou plutôt on lit) ce que tu as sur le coeur. Je ne veux pas te regarder « par en dessous », moi !
    Dis nous Cloudy. C’est difficile ce que tu vis, tu as le droit de le dire.
    Des bisous.

  4. Cécile dit :

    Je rejoins l’avis de toutes.Parles en car c’est une épreuve physique et morale, et surtout soit forte. Il va te falloir un mental de championne et des blogocops pour t’encourager.
    Ça ne t’aidera peut etre pas mais je connais ce parcours pour l’avoir vécu.

  5. Esterina dit :

    Dan cette épreuve les mots sont souvent vains, aussi je ne m’étendrai pas mais je t’embrasse bien affectueusement et oui nous sommes là amies virtuelles mais sincères n’en doute pas.
    des bisous doux

  6. Delph dit :

    Tu es chez toi ici, l’écriture sert aussi à cela non ? Mettre des mots sur ses maux. On est toutes avec toi. T’embrasse bien fort.

  7. Malou dit :

    Je viens ici sur la pointe des pieds, tout doucement, frapper à la porte de peur de déranger. Se glisser dans l’intime, pas facile et en même temps se dire que Cloudy s’exprime sur un blog ouvert à tous et à toutes…je suis très touchée par ce chemin difficile d’autant plus touchée sans doute que mon fils et ma belle-fille auront sans doute à l’emprunter….si tu m’y autorises Cloudy je viendrai de temps en temps dans cette bulle d’amitié….avec toute ma fraternité séléne.

    • Cloudy dit :

      Merci pour votre délicate venue Malou et pour ce message.
      Personne ne dérange ici.
      Écrire ce post n’a pas été aisé, car en effet j’expose mon intime. Et en même temps, il y a une certaine universalité dans cette expérience, traversée par d’autres fiveurs (comme on nous nomme sur certains blogs).
      En parler, c’est à la fois cathartique et impudique.
      Mais le soutien que je reçois ici me porte réellement. Je dois avouer que plus de personnes sont informées via le blog que dans notre entourage.
      Ici chacun à le droit de me dire ce qu’il a envie et je prends.
      Je vous souhaite à vos enfants et à vous même de n’avoir pas traversé tout cela…
      Des pensées à vous 🙂

  8. sandy dit :

    Cloudy,

    J’aimerais te dire qu’il ne faut pas penser à tout ça, que passer par les piqûres, les encouragements de l’infirmière, les récits d’expérience des uns et des autres, les « ça marchera quand vous n’y penserez plus », les stupides « tu veux un coup de main ? » à notre homme malheureux, les « quand on n’est pas capable de faire un gosse » de ses parents, la froideur des hôpitaux, la paire de gants blancs du gynéco… ce n’est rien. Ce n’est pas vrai. Parce que les rapports sexuels programmés n’ont rien de glamour, parce qu’on ne voit plus que les poussettes dans les jardins publics, parce que tous les couples autour de nous ont des mômes, parce que les prises de sang se succèdent, négatives, et qu’on a l’impression de rester sur le carreau. Alors viennent les interrogations. Pourquoi moi ? Pourquoi nous ? Qu’avons-nous fait de moins bien ? Rien, Cloudy. Et si ça ne marche pas ? Reste à inventer une autre fécondité. Autrement. Et vivre.

  9. Valérie, de 5 à 7 dit :

    Salut,
    je débarque un peu en retard et je découvre ton billet seulement maintenant…
    Je sais que tu viens chez moi de temps en temps mais je ne savais pas que tu traversais cette épreuve… Il y a presque 20 piges, quand j’ai rencontré mon homme, après 2 ans d’essais bébé infructueux, mon gynéco m’a balancé froidement « Madame, vous n’aurez jamais d’enfant avec votre mari ». On en a cinq maintenant. Le premier est né après dix ans d’attente, 7 ans de traitements et à la 4e FIV. Les 4 autres sont nés spontanément. (C’est la raison pour laquelle j’ai témoigné dans le Famili de mai.)
    Alors, ne lâche pas. Je ne connais pas ton histoire dans le détail mais comme le dit Sandy, il y a toujours une solution. Toujours. En l’attendant, je te souhaite le meilleur.

En direction du Cloudy World

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