Entrer dans la danse

J’ai vu  cette offre et j’ai pensé immédiatement qu’elle était faite pour moi.

En deux temps trois mouvements j’ai fait ma lettre, ajusté mon CV et j’ai envoyé le tout.

Quelques jours après j’ai regretté.

La peur.

La peur de quitter le connu (même pesant) pour une grosse machine de guerre, la peur de quitter mon équipe (même pesante) pour une grande équipe inconnue, la peur de délaisser mes connaissances, mes mécanismes, mes habitudes…

Puis le doute s’est insinué un peu plus chaque jour. Il a envahit tous mes pores, avant même que je sache si j’allais être retenue pour un entretien.

J’ai pris le parti de parler à ma peur, de faire avec elle, de la légitimer et j’ai pratiqué à haute dose l’EFT, j’en ai appelé à l’univers aussi.

Puis le coup de fil est arrivé, celui qui dit que tu es retenue et que ta compétence et ton parcours sont reconnus pour ce type de poste.

YEAAAAAAH

Et tandis que j’aurais du me réjouir, j’ai flétri.

Questionnements, remises en question. La totale. Je suis tellement forte en questionnements négatifs, en dénigrement. Je me suis préparée un tout petit peu, tellement incapable de me concentrer.

L’entretien, contre toute attente, s’est plutôt bien passé.

Parfois, l’avenir nous appelle et on est incapable de lui répondre.

Mais pour une fois, j’aimerais beaucoup prendre ce train là…

 

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Winter is coming

La neige est tombée, accompagnée d’un froid saisissant. Comme pour dire qu’il faut tourner la page. Passer à autre chose.

Passer à autre chose, je ne rêve que de ça.

Un chalet en montagne, une vue baignée de neige. Un feu qui crépite, du chocolat chaud (du Angelina, ma gourmandise n’est jamais loin), un bon bouquin, un pyjama et des chaussettes pilou et un lit king size.

Ce serait ça le bonheur.

Le silence, la nature et moi.

Car tout le reste devient trop, tous les autres sont de trop.

La reconnexion, le silence, la mise à distance me sont indispensables et pourtant impossible à mettre en œuvre. Impossible d’échapper aux contingences du quotidien, même lorsque le bruit intérieur devient assourdissant.

Paris…

Paris
Où fait-il bon même au coeur de l’orage
Où fait-il clair même au cœur de la nuit
L’air est alcool et le malheur courage
Carreaux cassés l’espoir encore y luit
Et les chansons montent des murs détruits
Jamais éteint renaissant de la braise
Perpétuel brûlot de la patrie
Du Point-du-Jour jusqu’au Père-Lachaise
Ce doux rosier au mois d’août refleuri
Gens de partout c’est le sang de Paris
Rien n’a l’éclat de Paris dans la poudre
Rien n’est si pur que son front d’insurgé
Rien n’est ni fort ni le feu ni la foudre
Que mon Paris défiant les dangers
Rien n’est si beau que ce Paris que j’ai
Rien ne m’a fait jamais battre le cœur
Rien ne m’a fait ainsi rire et pleurer
Comme ce cri de mon peuple vainqueur
Rien n’est si grand qu’un linceul déchiré
Paris Paris soi-même libéré
Louis Aragon, 1944

Le Jour d’après

CTwYCHLWwAADzMz

On se coupe de toute bribe ne serait ce infime d’information

On ouvre grand les fenêtres parce qu’il fait beau dehors

On savoure chaque bouchée du petit déjeuner

On respire bien fort et à plein poumon lorsqu’on est dans la rue

Nous avons décidé d’aller marcher, hier et aujourd’hui encore parmi les parisiens parmi tous ceux qui sont là bien présents, bien vivants

C’est notre acte de résistance, notre acte de réconfort à nous

On ne pense à rien et surtout pas à demain

La ville ce matin encore est incroyablement silencieuse, empreinte de peur tapie et aussi de d’envie de vivre

Le mot terrifiant de guerre résonne terriblement à notre oreille

On ne pense pas à demain, parce que demain certains des miens reprendront le métro, auront à traverser la ville, à continuer à vivre malgré tout

On est à aujourd’hui. Une journée baignée de soleil, une journée pas tout à fait comme les autres

Le jour d’après. Celui où les langues, les critiques, le désarroi, la peine éclosent.

 

 

Food Junkie

Qu’est ce qui fait que je pourrais me mettre à table, à 18 h en rentrant du travail et m’enfiler à peu près tout ce que contiennent mes placards

Qu’est ce qui fait que lorsque j’ai fini de manger, j’ai encore faim et que je pense à la bouffe une grande partie de la journée

L’exigence, l’image dépréciée de moi, le manque (de mon mari, d’amis, d’amour, de reconnaissance ?)

Je me fais l’effet d’être une junkie. Qui a besoin de sa dose de sucre pour supporter un quotidien exécrable.

C’est vrai, j’ai un toit, de quoi manger justement, je suis en relative bonne santé, j’ai de quoi me vêtir et j’ai un foyer. Bien sûr que c’est vrai et parfois j’ai presque honte de cette opulence lorsque je croise, chaque jour, le dénuement des autres

Mais il n’empêche, le besoin coupable de me remplir, coûte que coûte est revenu comme un oiseau de mauvaise augure

Je sais ce que ça me dit, mon corps le sait aussi, victime discrète de ce cerveau qui ordonne les prises de poids puis les mises à l’épreuve drastique

Un adage dit « qui a bu, boira » en est il de même pour ce cercle infernal dans lequel je suis depuis des dizaine d’année

J’ai tout essayé. Mise à part la lobotomie je ne vois pas.

Comment fait on pour se remettre de ce qui a été enfant, de ce qui n’est plus adulte mais qui a creusé son sillon si profondément que chaque secousse revient remuer la boue encore et encore

Parfois, je surprends le regard des autres sur moi. Sur ce que je mange et je lis parfaitement ce qui s’imprime dans ces regards compatissants ou accusateurs, à la marge interrogateurs et je n’en mange que plus

Je suis ma victime et mon bourreau, ma sauveuse parfois mais une sauveuse qui encore une fois n’ai pas capable de se battre à armes égales.

 

 

Dire

Pour moi

Respecter mes émotions, ne plus m’exclure, me mettre au centre

Pour l’autre

Le respecter, pour qu’il sache, sente

Dire pour légitimer, défendre, revendiquer, adoucir, déclarer, afficher, oser

Dire pour me rapprocher de moi, de mes besoins, de mes envies, de mes peurs, de mes colères

Dire pour ne pas oublier, ancrer

Enfin, à nouveau, pour ne plus cesser (d’être moi)

 

Dans le monde

Prendre le train jusqu’à la côte.

Au loin découvrir la mer, les palmiers et me sentir projetée dans une atmosphère de vacances, de temps suspendu.

Regarder les couleurs, surprendre un rapace sur une branche, s’émerveiller de tout jusqu’à l’ultime coucher de soleil.

Marcher dans la foule, savourer : le soleil, les mouettes, certaines femmes en tong, des hommes en short. Un air d’été.

Tout est loin.

Puis vient le moment.

Celui de la méditation universelle.

Celui où âme parmi des milliers d’autres, je me sens toute petite et néanmoins puissante.

Dans le monde, là, infiniment.

2015-11-01 17.08.58